La République introuvable Il y a des paradoxes qui sont suicidaires. En effet, qui pourrait croire que celui qui déclare ne pas avoir de comptes à rendre soit en même temps celui qui est chargé de promouvoir l'Égalité et d'en vérifier l'application. Notre Code Civil met en avant la responsabilité de tout un chacun, et l'égalité de tous en face de cette responsabilité. Les juges sont chargés de vérifier les conditions de cette mise en œuvre, de peser les cas de responsabilité, de constater la culpabilité, de poursuivre les fraudes, et en toutes choses de faire respecter l'esprit de la Loi, issu des principes républicains. Ce faisant, tous les citoyens de ce pays doivent être soumis à ces lois, et la bonne logique veut que chacun soit convaincu de leur valeur, c'est d'ailleurs le but de l'instruction civique. Pendant longtemps, en se servant des difficultés de l'administration de la preuve, de nombreuses institutions et corporations ont échappé à l'application réelle de ces lois, grâce à un savant jésuitisme, à des multiples lois du silence, à des méthodes datant de périodes que nous ne voudrions pas revoir. Mais les progrès de la transparence, et la vitesse de transmission des informations jointe à l'amélioration de l'éducation du plus grand nombre, sans compter les difficultés que rencontrent les censeurs, nous permettent aujourd'hui de réclamer que Justice soit rendue. Seul problème, et il est de taille, ceux qui devraient être les plus ardents défenseurs de cette Égalité, ceux qui devraient en faire un credo, ceux qui devraient mettre en avant dans leur travail ces principes républicains, ce sont eux qui refusent que la Loi les concerne. Ils décident qu'ils ne seront pas concernés par les principes qu'ils appliquent aux autres. (Nous nous permettrons de tempérer notre affirmation, en mettant en avant les efforts de certains, mais bizarrement au péril même de leur vie.) J'en veux pour preuve cette affirmation faite récemment à la télévision sur une chaîne publique et parlementaire par un haut magistrat, qui expliquait que la décision prise par un juge est une décision de la Justice et ne pouvait donc pas faire l'objet de contestation, sauf selon les règles décidées par la Justice. Lorsque vous rapprochez cela des décisions du Conseil Supérieur de la Magistrature saisi de manquements, vous êtes totalement persuadé qu'effectivement, ces fonctionnaires appartiennent à un autre monde. Hors, nul ne peut invoquer sa propre turpitude, c'est ce qui nous est répété en permanence, alors, cela ne peut que renforcer l'idée que le système judiciaire dans son fonctionnement reste une émanation de l'exécutif, avec toutes les dépendances et les renvois d'ascenseur que cela suppose. Il existe dans ce pays une catégorie de citoyens qui contrôlent l'État, et qui, selon leur degré de moralité, tapent plus ou moins lourdement dans la caisse, avec la bénédiction de toute l'administration, qui s'en trouve largement remerciée par des avantages divers et variés. Pendant des décennies, et même plus, préoccupé par l'avenir de ses enfants, persuadé de la qualité de l'ascenseur social, convaincu de la probité de ses représentants élus, le citoyen de ce pays a cru à la bonne foi de ses élites. Aujourd'hui, ce n'est plus possible, car l'inflation dans ce domaine comme dans d'autres a produit ses effets : cumuls, détournements, commissions, fraudes, concussion, pantouflage, la panoplie et les cartes de visite de la plus grande partie de nos haut-fonctionnaires et élus est devenue un scandale permanent. Mais que faire ? Certainement pas chercher Superman ou Astérix, mais plutôt se retrousser les manches en surveillant l'usage des mandats des élus, en participant aux commissions locales et quelquefois plus, en sanctionnant les manquements, en diffusant les informations. Les fonctionnaires doivent justifier leur action, comme les syndicalistes, les haut-fonctionnaires, et tous ceux qui vivent du système, c'est-à-dire de nos impôts. En ces périodes difficiles, dues à à tous les « B.O.F. » de tout poil, il est nécessaire d'exiger plus de rigueur, de façon à faire ressortir, à mettre en évidence toutes les méthodes qui permettent de ponctionner le citoyen ordinaire, tout en le culpabilisant, jusqu'à lui faire croire que l'existence de bidonvilles est de sa faute. Les salaires sont trop élevés, seule la misère des plus pauvres est acceptable, comment peut-on oser diffuser de tels mensonges, et se prétendre expert !!! Une chose est sûre, de telles affirmations devraient faire l'objet de poursuites judiciaires pour incitation à la discrimination, pour escroquerie, ….. les Lois sont nombreuses, mais il n'y a personne pour les appliquer …. C'est malheureusement bien ce que nous pensions.avantages,
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La République introuvable
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Le vertige
Dans tous les sens du terme, il n'y a pas d'autre mot pour essayer de transcrire l'impression que donne l'accumulation de la richesse dans le monde. Et pourtant, jamais autant de fonctionnaires internationaux ne se sont penchés sur le problème de la pauvreté. La sociologie présente cette particularité de nous permettre de comprendre une situation, sans nous permettre d'agir. Le sociologue constate, il est un spectateur privilégié, pieds et poings liés.
De ce fait, le cri, de plus en plus assourdissant, de toutes les victimes de ces hauts faits économiques ne peut masquer leur incapacité à agir.
Celui qui n'a rien peut quelquefois devenir riche, celui qui est réellement devenu riche ne peut plus revenir en arrière. La cohorte de ceux qui doivent leur « situation » aux gens riches est telle qu'ils vont se charger de faire vivre le système. Leur intérêt immédiat est de ne pas voir, de ne pas entendre, et de ne rien faire. Les lanceurs d'alerte sont ceux qui choisissent volontairement de quitter la cohorte, sont-ils inconscients ou ont-ils un sens de l'Histoire au-delà du commun des mortels, peut-être ont-ils simplement un sens des valeurs différent. Comment savoir qui s'inscrit dans le sens de l'Histoire ? Impossible de répondre pour notre esprit limité.
Car, c'est là le plus dur, reconnaître que l'Humanité est incapable de comprendre son Histoire relève d'une conscience individuelle qui dépasse toute volonté d'accumulation matérielle. La richesse, qui mobilise toutes les capacités intellectuelles de la société occidentale, tente bien de noyer le problème, en essayant de montrer que tous les systèmes actuels, politiques et économiques, tendent à s'unifier autour de la justification de son existence.
Mais cette philosophie, si elle en est réellement une, ne peut masquer son incapacité à organiser une vie sociale capable de maîtriser l'environnement immédiat de l'humain. La richesse se caractérise par de l'activisme et du nombrilisme, deux erreurs de l'application des capacités cognitives à l'étude de l'environnement. Les riches sont responsables, mais pas coupables, donc circulez, il n'y a rien à voter, vos droits sont ce qu'ils vous laissent à ronger, puisqu'ils contrôlent les rouages de l'organisation sociale. La méthode est celle de la corruption passive la plus ordinaire, puisque tout ce qui est refusé aux riches engendrera de l'austérité et des restrictions. Il ne faut pas oublier que la coercition la plus ordinaire permet de marginaliser, sinon de faire disparaître les pensées divergentes. Les religions promettent un ailleurs meilleur, la richesse considère qu'elle aura les moyens de s'attribuer cet ailleurs dès aujourd'hui, tout en exploitant la crédulité ordinaire pour amplifier encore son emprise. Être riche permet de croire que l'immortalité est à portée de main, même si l'Humanité en meurt.
Toutes ces considérations pour constater que nos efforts ne peuvent se limiter à lutter contre les injustices. Nous devons donner du sens à la vie, à la mort, ce que ne font pas les vendeurs d'illusion. Toute vie est transmission, mais d'autre chose que d'un patrimoine éphémère évalué par Pierre ou Jacques, et notre réussite dépendra de la capacité à trier dans les technologies celles qui accéléreront la marche de la science vers la fusion de l'Homme et de son environnement.
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Droit à l'indemnisation
Victimes et droits d'indemnisation
Victimes des notaires, victimes des huissiers, victimes de harcèlement, victimes d'agression, victimes de viols, victimes d'escroquerie, victimes d'abus de faiblesse, victimes du Médiator, victimes d'empoisonnement, victimes de la crise, victimes de la guerre, victimes d'épidémie, victimes de la famine, … les faits divers sont une succession, pour ne pas dire une litanie de listes de victimes.
Pourtant, dans chaque catégorie sociale, il y a plus de personnes qui ont échappé à la victimisation que de personnes qui ont succombé.
La tendance est de ce fait à dire qu'il y aura toujours des victimes, qu'il ne sert donc à rien de passer son temps à pourrir la vie des autres à ce sujet. Ce serait acceptable si les causes n'étaient pas détectables, et si les conséquences étaient toujours une prise en charge des victimes. Tel n'est pas le cas, car tous les pouvoirs considèrent l'atteinte au principe d'autorité comme plus important que de rétablir des situations obérées. Il en résulte que les victimes sont aujourd'hui répertoriées plutôt dans le but de montrer que l'autorité doit être respectée. Que les conséquences de la cause soient éradiquées, et que la victime puisse être rétablie dans ses droits importe finalement peu. Et c'est sur une telle base que la victime reconnue peut continuer à subir les conséquences de la situation qui l'a déjà amoindrie.
Si l'on veut bien constater que la recherche d'avantages se fait toujours au détriment des autres, il devient intellectuellement difficile de faire restituer ce qui a été abusivement perçu. En effet, au pays de l'Égalité, il est difficile de séparer les bénéficiaires d'avantages en plusieurs catégories, qui seraient par raisonnement théorique susceptibles d'être ou non justifiées. Ce sont ces ambiguïtés dans la langue, qui résultent de contextes historiques, qui rendent difficile la lutte contre de nombreux excès. Comment dénoncer des privilèges, tout en justifiant des avantages. Bien malin qui y réussira !
Conséquence directe, les catégories de victimes sont multiples, et sont souvent considérées comme plus gênantes qu'intéressantes pour les gouvernants. Et si vous avez la chance (!!!) de faire partie des victimes « bien en cour », « à la mode », vous serez plus ou moins indemnisé, tandis que si vous faites partie des catégories qui mettent en cause le pouvoir, vous resterez victime, sans plus, donc avec beaucoup moins, même si il en est beaucoup parlé. Car reconnaître qu'il existe des victimes des institutions, c'est montrer une faiblesse, ce qu'aucun pouvoir n'accepte. Il est possible d'abuser de la faiblesse des autres, mais pas de l'autorité, car cela est perçu comme un affaiblissement de la République. C'est de cette manière que la corruption combine les avantages, les privilèges, les abus de confiance, si bien que plus personne ne s'y retrouve.
Il serait donc important que la situation de victime soit séparée en deux : d'une part, ce qui concerne la cooptation, société, représentée par le procureur, d'autre part, ce qui concerne les conséquences personnelles, représentées par un juge de l'évaluation. Le jugement comprendrait donc deux volets, que le juge de l'exécution serait chargé d'appliquer. De la même manière qu'il serait ainsi statué sur le trouble subi par l'État, il serait statué sur les troubles individuels. Parler de reconstruction de la personnalité passe par des rééquilibrages que chaque profession devrait avoir à assumer, par le biais d'assurances, regroupées et contrôlées par des mécanismes impartiaux et indépendants. La victime serait donc indemnisée, à charge pour le système d'assurances de se faire dédommager ou indemniser. Plus le risque est grand, plus le coût est élevé, et plus le métier a intérêt à savoir surveiller. Ce n'est pas le cas dans notre pays, puisque le système de cooptation en place, complété par le poids des réseaux, empêche toute prise de conscience tant des élus que des haut-fonctionnaires. La situation s'est encore dégradée ces dernières années, avec des protections et des revenus supplémentaires attribués aux élus et aux haut-fonctionnaires Si le poids du budget de chaque ministère était amputé du coût des fautes passées, la surveillance serait certainement meilleure ; même chose pour les corporations protégées comme les notaires, les liquidateurs, les gestionnaires de fortune, les administrateurs de biens, mais aussi la police, l'armée, ….
Les victimes ont toujours été manipulées, surtout pour servir le pouvoir , qui préfère négocier avec des puissances en place plutôt que de mettre fin à des anomalies criantes. C'est ainsi que les politiques se sont fait acheter de tous temps, notre centralisation a fait le reste.
Un autre avantage de l'obligation d'indemniser immédiatement serait la conséquence sur la profession concernée dont les coûts d'assurance augmenteraient. Bien sûr, il faut réfléchir aux effets pervers, mais l'implication de la collectivité comme garante permettrait à de nombreuses associations de surveiller et d'intervenir.
L'imagination au service de la collectivité peut être plus féconde que celle des délinquants, car il y a plus de contributeurs.