Quand rien ne fonctionne, la dérision reste encore le meilleur antidote à la morosité.
Marianne est autiste.
En lisant les multiples déclarations de nos dirigeants politiques, très forts sur la manipulation des chiffres, des statistiques, experts en contorsions dignes des plus grands cirques de la planète, il est facile de comprendre que ce n’est pas la résolution des problèmes de notre société qui les intéresse, mais surtout l’art de la cuisine. En effet, en cuisine, l’usage du beurre est un art qui, combiné aux rotations de l’assiette au beurre, donne des effets de manche, des effets de langue, des effets secondaires, dont les conséquences sont des plus inattendues. Qui pourrait penser, par exemple, que la Justice, après avoir cuisiné les prévenus, soit capable de blanchir les uns, tandis qu’elle roule les autres dans la farine.
La Fontaine en parlait déjà, Ésope avant lui, et, en cherchant bien, dans les textes chinois anciens, il y en a des traces.
C’est que la recette du pouvoir est surtout de se regarder dans les miroirs, et non de chercher à tempérer les appétits en tous genres de ceux qui sont surtout mus par leurs impulsions et leurs envies. L’important est d’être Roi, et tout doit être sacrifié sur l’autel de cette sanctification.
La République Française, digne héritière de Clovis, et toujours adepte des pouvoirs forts, continue à être dirigée par un système administratif basé sur la force, la violence, la rouerie, la filouterie, toutes qualités mettant en valeur des capacités d’imaginations tournées vers la réussite à court terme, quels que soient les dégâts causés sur nos concitoyens.
Les principes sont là pour occuper les philosophes, pour permettre aux idéalistes de ne pas sombrer dans la dépression, pour montrer que nos dirigeants sont capables de promouvoir les sciences, les lettres et les arts. Quant à la réalité, que le mille-feuille administratif permet d’encourager en sous-main, elle est beaucoup plus simple, basée sur le train de vie et les dépenses que les autres supportent.
Pour ces gens-là, monsieur, la solidarité et le partage sont basés sur l’accumulation de la richesse, dont il est « normal » de redistribuer quelques miettes pour montrer sa mansuétude et son empathie.
Pour ces gens-là, monsieur, seuls les riches ont quelque chose à donner, la misère ne se partage pas, elle se subit en silence.
Les règles qui voudraient que la réussite soit dans la qualité de la vie, dans le bien-être, sont des utopies qu’il ne faut surtout pas promouvoir. La vie n’est qu’une partie de poker menteur permanente, avec des cartes biseautées, aimantées, falsifiées, et la bonne foi est la meilleure manière d’avoir tort.
Cette alchimie permet de comprendre pourquoi la Constitution Française met en avant des préambules et des principes donnant l’impression de créer un État de droit d’une rigueur totale, tandis que les textes régissant le fonctionnement sont l’objet des pires trafics, basés sur la puissance des relations et des arrangements, l’organisation de cooptations fumeuses, la dilapidation des fonds publics.
Il faut s’approprier, la méthode importe peu, seule l’occasion compte, qu’il ne faut pas laisser passer, car les signes de faiblesse sont rédhibitoires et vous éliminent du jeu. On croirait presque un jeu de rôle dans lequel tout serait permis.
Comment peut-on affirmer cet état de fait, tout simplement en se basant sur les archives accessibles de nombreuses administrations au sein desquelles il est possible de constater que les fonds ont bien été dépensés, alors que les objectifs n’ont jamais été atteints, ce qui équivaut à dire que le détournement est permanent. Une autre source se trouve dans les documents des Cours des comptes, dont les rapports sont savoureux, mais sans beaucoup d’effet. Enfin, plus grave, des publications annoncent des scandales dont l’existence est vérifiée, le temps passe, et vous constatez que les carrières des intéressés se sont poursuivies sans anicroche.
Et donc quand les principes du droit ne sont pas respectés, la porte est ouverte aux trafics d’influence les plus sordides, aux chantages les plus pervers, à un système judiciaire déliquescent. Les bâtiments judiciaires deviennent même l’occasion de belles affaires immobilières, ne parlons pas de l’intérieur, tout est à l’avenant. J’oubliais une des causes du silence assourdissant de cette gabegie, le secret-défense, qui permet de simplement dire : « Circulez », la mitraillette en bandoulière, au cas où ..., bien sûr dans notre intérêt, assaisonné d’un peu d’état d’urgence pour faire bonne mesure.
Mais nous espérons quand même, et nous partageons nos espoirs, ...